À quoi pensent les photographes qui ne prennent pas de photos?
Il leur arrive de se demander pourquoi d’autres prennent des photos.
J’ai passé une bonne partie de ma journée au Salon des beaux arts de Montréal. Il y a en ce moment une très belle exposition. De Van Gogh à Kadinski. Une bien belle journée, une belle exposition.
J’avais pris mon appareil photo. Non, pas pour faire des photos des toiles. Elles sont toutes visibles sur le site du Musée. J’avais prévu de faire des photos dans le métro. Finalement, j’ai fait plus de photos de visiteurs photographiant les toiles.
En les voyant faire ces photographes là, je me posais la question de savoir pourquoi. Pourquoi photographier toutes les toiles (sauf celles spécifiées non reproductibles)? Pour montrer qu’on est allé au mbam?
J’ai repensé à un article qui m’avait beaucoup intrigué. Paru dans « le monde »
« Déjà Rimbaud se plaignait des ruissellements fastidieux de photographies (dans une lettre de 1871 à son ami Paul Demeny). Déjà Italo Calvino se moquait en 1955 de «la folie de l’objectif», la frénésie de tout photographier qui s’emparait de centaines de milliers d’Italiens les dimanches de printemps. Que dire aujourd’hui devant la prolifération du numérique, l’abondance des smartphones, la glorification des selfies? »
Ce très bon texte raconte la démarche d’un photographe :
« Et un jour, devant un très beau lever de soleil, il décide de seulement le contempler et ne se lève pas pour le photographier. Un jour, donc, il refuse délibérément de photographier, il préfère regarder plutôt que viser, jouir plutôt que posséder, imprimer un souvenir dans sa mémoire plutôt qu’une image dans un album ou un fichier. »
C’est à tout ça que je pensais hier en voyant des visiteurs-trices parcourir l’exposition presque au pas de course, photographiant chaque toile, puis le texte qui l’accompagne.
Peut-on voir correctement et photographier? Y a t-il des moments ou prendre une photo va nuire au plaisir de voir?
J’aime beaucoup l’histoire d’Alessandra Sanguinetti: autre lien ici
» Chaque jour, la photographe américano-argentine dit prendre au moins deux photos imaginaires entre son pouce et son index: des photos de sa fille, de sa famille, de ses amis, de scènes qu’elle ne veut pas interrompre, dont elle ne veut pas se distancier en se plaçant derrière son viseur, ou qu’elle ne veut pas rendre davantage mélancoliques en les transformant en images photographiques. »
Qu’en pensez vous?
L’article est à lire icitte (oups….): Les photographes qui ne prennent pas de photos.
Bonne journée à toutes et tous
Bel article.
Une réflexion très intéressante. En fait, c’est curieux, mais il m’arrive très souvent de regarder à travers mon viseur, non pas pour prendre une photo, mais pour mieux voir. Le « cadrage » est toujours une expérience magique, bien plus que la photo elle-même peut-être, du moins pour moi.
L’instant est fugace;ceux qui veulent le prolonger ou le faire partager prennent une photo. Actuellement, on ne fait plus de la photo, on prend des photos de tout et de rien: peut-être le besoin de vouloir arrêter la fuite du temps…Personnellement, je prends une photo quand je suis étonnée, émerveillée, et j’utilise ces émotions pour les exprimer dans des peintures. Mais pour cela, il faut être seul, choisir le lieu ou le moment, car la promiscuité ne facilite pas les choses…
Je n’arrive pas à lire l’article, dommage. Et le deuxième lien m’emporte aussi ailleurs, mais pas sur l’article.
je pense qu’il y a deux temps, deux moments différents, le temps de la contemplation qui enrichit, qui nourrit, qui est celui de l’intériorisation. Et puis le temps où il y a fixer un moment, c’est aussi un moment de partage pour plus tard, avec d’autres.
Ce n’est pas comparable: personnellement j’aime les deux, qui nourrissent des espaces différents en moi.
Pour moi, la photo m’a appris à regarder et à voir. Je reste de longs instants à contempler avant de faire une photo. L’appareil est l’ami fidèle avec lequel je dialogue, je ne suis pas une fanatique du déclencheur. Je préfère savourer chaque instant, chaque cliché.Belle journée Dom. Amitiés. Joëlle
Quand tu photographies, ton œil est autre car tu ne penses pas à l’œuvre de l’artiste mais à ton œuvre (celle que tu auras réussi à photographier !)
Amusant j’avais fait la même réflexion sur le blog d’un copain qui avait posté ceci
http://niveauxdegris.canalblog.com/archives/2015/01/06/31264483.html
Incompréhensible pour moi.
Pour le reste, j’essaie toujours de prendre le temps, regarder d’abord, admirer, savourer, et photographier ensuite. Ou pas.
PS : Le lien à la fin ne fonctionne pas.
Courte pause d’écriture. Je reviendrai pour un commentaire sur ton sujet. Je veux juste te signaler que le lien vers l’article sur Alessandra Sanguinetti ne fonctionne pas. Pour moi en tout cas. Est-ce parce que je suis sur Mac?
Bonjour,
Est-ce parce que tu es sur Mac? Je ne pense pas.
Là, il semble fonctionner. sinon essayes là:
http://www.magnumphotos.com/C.aspx?VP3=CMS3&VF=MAGO31_10_VForm&ERID=24KL53X_A
Et oui.. là est la question, photographier ou pas.. question que je me pose maintenant chaque fois que j’attrape mon apn et cours pour photographier le coucher du soleil depuis mon balcon.. Et parfois j’arrive à le reposer et juste regarder le magnifique spectacle.. et en profiter ! Photographier les toiles dans un musée, non, mais photographier une ambiance, composer une image avec la toile ou l’objet et un mur, une fenêtre.. oui !.. Bises, Dominique !
Il est impossible d’admirer et photographier en même temps. Donc, je prends de très très très belles photos mentales qui me ravissent.
Il me souvient qu’une jeune femme m’avais demandé de photographier les invités à son mariage. Ce fut un grand plaisir, mais je me suis aperçue que je n’avais pas trop pris part à cette cérémonie.
Pareil lorsque j’ai voulu prendre des vautours, pas profité de leurs vols.
Je viens de lire attentivement ton article, et oui, parfois, ce comportement que tu décris me fait sourire avec gentillesse je le précise.
Des déclenchement à la file sans même pendre le temps d’apprécier…
Je me suis fait de nombreuses fois cette réflexion, une fois entre autres, sur les cimes des Pyrénées ou je me trouvais depuis des heures à admirer (et aussi photographier) les vautours, ou et un couple est passé au pas de course et hop, un cliché et je me sauve sans même relever la tête pour admirer leur magnifique vol.
D’autres fois encore en des tas de circonstances.
Maintenant, chacun de nous est différent, ne recherche pas les mêmes choses, a d’autres valeurs, d’autres envies…. finalement c’est bien comme ça, parce que je crois en toute franchise que cela me gonflerai d’être au sommet de mes montagnes avec trois cent personnes autour qui font la même chose quand je recherche justement cette paix dans le silence et dans la solitude.
L’essentiel est que chacun y trouve son compte non ?
Je te souhaite une bonne journée